7 novembre 1828 - Gazette des tribunaux N°1014

On nous écrit de la Martinique:

"La veuve Marlet, dont on connait les violences criminelles envers trois esclaves, et qui avait été mise en liberté par la cour royale de la Martinique, a été arrêtée de nouveau après délibération du conseil privé, présidé par M. le Maréchal de camp Barré, gouverneur par interim de la colonie. Le tribunal de Saint-Pierre (voir la gazette du 16 octobre 1828), condamna la veuve Marlet à 20 ans de bannissement des colonies françaises. Ainsi la veuve Marlet peut aller en France jouir de tous ses droits."


9 novembre 1828 - Gazette des tribunaux N°1015

COLONIES FRANÇAISES.

COUR ROYALE DE LA MARTINIQUE

Affaire de la veuve Marlet, accusée de châtimens cruels et inhumains envers ses esclaves, de coups et blessures envers une négresse, et d'assassinat sur la personne d'un nègre. (Voir la Gazette des tribunaux du 16 octobre.)

Voici les principaux considérans de l’arrêt prononcé par la Cour, dans son audience du 3 septembre 1828.-

  " En ce qui touche l'administration de la dame Marlet : attendu qu'il est prouvé au procès, tant par les dépositions de Milon-Dumoulin, de Gaubert, de Richaume, de Céleste, que par le rapport du sieur Luppé, commissaire commandant du Robert, à M. le directeur général de l’intérieur, en date du 3o août 1817, ainsi que par divers documens émanés des propriétaires voisins, qu’il régnait sans cesse les plus graves désordres sur l'habitation de 1’accusée, que ses nègres étaient souvent privés de nourriture ; qu’elle excédait habituellement par ses mauvais traitements envers eux, les droits et prérogatives que les lois attribuent au maître sur son esclave;

Attendu qu'il est prouvé par les témoignages de Gaubert, de Céleste, par le rapport du commisssaire commandant, par l’aveu même de l'accusée, qu'elle a fait, avec un instrument tranchant à la nommée Firmine, une blessure grave d'où il est résulté effusion de sang ;

En ce qui touche la mort du nommé Rémy :

Attendu que si la veuve Marlet a été accusée d'avoir occasionné la mort de cet esclave par un châtiment illégal et des plus violens l’accusation à cet égard est denuée de toute preuve, d'une part, il a été impossible de constater l’état du cadavre, par suite du temps qui s’était écoulé lorsque la plainte a été portée; de l'autre, aucun témoin au procès ne dépose de ce fait d'une manière positive, ceux qui en parlent ne le font que par ouïe dire:

et si la justice a recueilli quelques circonstances de cet événement, elle ne les doit qu’à dame Marlet elle-même, qui, en avouant cette mort, l’attribue au poison administré par Osée, son commandeur.

Attendu que sur ce point, la déclaration de la dame Marlet ne peut se scinder, et que lors même qu'on voudrait la diviser, il ne serait nullement prouvé que la mort de Rémy a été la suite d’un châtiment dont la justice ne connaît même ni la nature ni l’étendue ;

Déboute la veuve Marlet des différentes exceptions par elle proposées, déclare les reproches par elle fournis contre les divers témoins ouïs au procès non pertinent et inadmissibles; maintient la lettre du sieur de Gaalon et le rapport du sieur de Luppé, commissaire commandant du Robert;

Met au néant les appellations relatives au règlement de l'extraordinaire au décret de prise de corps, ordonne, quant à ce, que ces jugemens sortiront effet ;

Met, en ce qui touche l'appel de la sentence définitive du 31juillet dernier, l’appellation et ce dont est appel an néant; Entendant, condamne la veuve Marlet à trois années de bannissement des colonies françaises, la déclare incapable de posséder des esclaves; ordonne que ceux qu’elle possède à titre de domestiques seront par elle vendus dans le délai de quinzaine, faute de quoi faire elle y sera contrainte sur les diligences du ministère public; -

Lui fait défenses de jamais s’immiscer dans la gestion de ses habitation, et même de s'y présenter sous telles peines qu’il appartiendra; lui enjoint de garder son ban, et la condamne même par corps, en tous les dépens."


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